Quand le passé se présente : Une anthropologie de l'enchantement, la mise en narration des restes fossiles de non-humains à l'Institut Royal des Sciences naturelles de Belgique, à Bruxelles

Abstract

Comment une structure de médiation telle qu’un muséum d’histoire naturelle emplit-elle de sens une pierre pour en faire un fossile ? De manière créative, par la mobilisation de référents de la culture populaire et de la science paléontologique. En effet, l’institution jongle entre ces deux dimensions pour produire un discours sur ces objets qui puisse convaincre le scientifique aussi bien que le visiteur. Ce mémoire propose dès lors d'analyser la structure du muséum comme composée de deux piliers interdépendants : d'une part un cadrage scientifique, venant proposer une vision du monde propre à l’ontologie naturaliste occidentale, d'autre part un dispositif d’enchantement, une expérience de connexion émotionnelle forte aux objets présentés, permettant de faire sortir de l’obscurité ces restes d’animalités, ces médias, sans quoi ils ne resteraient que des morceaux de pierre. La structure du muséum est fragile, et résulte en une tension perpétuelle entre les imaginaires des visiteurs et l’intention d’objectivité du champ de la science. De fait, l’institution jongle avec l’imaginaire, entre utilisation et rejet, dans son rapport à ces “épaves splendides”, sans lequel le sens semble filer entre les doigts des scientifiques, des guides et des visiteurs. Cette ethnographie est présentée par le chercheur-spectateur, qui assiste à la mise en scène d’une pièce de théâtre, soutenue tant par la bonne volonté des visiteurs que par l’ingénierie des guides.