La décision partagée dans la prise en charge des mineurs en pédopsychiatrie : une investigation sur le vécu des usagers

Abstract

Introduction : Ce mémoire s’intéresse à la perception de la décision partagée (DP) du point de vue des adolescents hospitalisés en pédopsychiatrie. La participation des jeunes aux décisions de soins qui les concernent constitue un enjeu éthique, clinique et juridique. En pédopsychiatrie, cette implication se confronte à des spécificités liées au développement, au statut de mineur et à l’influence de l’entourage familial et institutionnel. Ce travail s’inscrit dans le cadre du modèle de rétablissement, qui met l’accent sur l’empowerment (le pouvoir d’agir), l’autonomie et la reconnaissance du savoir expérientiel, ainsi que dans la perspective de la DP, entendue comme un processus de co-construction entre usagers, professionnels et, le cas échéant, familles. L’objectif est d’explorer comment les jeunes hospitalisés perçoivent leur implication et les facteurs qui facilitent ou entravent leur participation. Matériel et méthode : L’étude adopte une démarche qualitative inductive, inspirée de la théorie ancrée. Les données ont été recueillies auprès de six adolescents hospitalisés dans un service pédopsychiatrique, au moyen d’entretiens semi-directifs enregistrés et retranscrits. L’analyse thématique a suivi différentes étapes, avec un codage indépendant effectué par deux évaluateurs visant un accord interjuge. Résultats : L’analyse met en évidence trois dimensions principales : le rétablissement est envisagé comme un processus personnel axé sur le sens, l’identité et la reprise de contrôle sur sa vie ; la participation aux décisions se présente de manière très variable, allant de l’absence totale à une co-construction partielle ou complète ; enfin, divers facteurs influencent ce processus, tels que la qualité du lien avec les soignants, la posture d’écoute, le rôle ambivalent des parents et les contraintes institutionnelles. Les adolescents expriment un besoin fort d’être écoutés et leur implication effective dépend largement des conditions relationnelles et structurelles mises en place. Conclusion : Les résultats révèlent un écart entre l’idéal de participation et les réalités structurelles, relationnelles et culturelles des institutions. Favoriser une DP authentique suppose d’agir à la fois sur les pratiques professionnelles, la formation des équipes et les conditions organisationnelles. De futures recherches pourraient intégrer le point de vue des parents pour éclairer les dynamiques triangulaires entre mineurs, familles et professionnels.