Dynamique de contamination en chlordécone en phases dissoute et particulaire en rivière

Abstract

La contamination historique et chronique des écosystèmes volcaniques tropicaux par la chlordécone (CLD), pesticide organochloré persistant et massivement utilisé aux Antilles françaises, justifie l’étude du transfert des produits phytosanitaires en rivière. Les propriétés physico-chimiques de cette molécule lui confèrent une prédisposition au transport majoritaire par voie particulaire. Cette problématique nécessite l’étude i) de situations hydrologiques contrastées (crue et hors crue) et ii) des facteurs déterminant la forme de transfert tels que les matières en suspension (MES). Les principaux objectifs de cette étude consistaient en l’analyse des dynamiques de contamination et l’identification de la phase de transfert majoritaire de la chlordécone en rivière. Entre août 2016 et mars 2018 inclus, 15 crues correspondant à 200 échantillons ponctuels et 25 prélèvements manuels ont été acquis à l’exutoire de la rivière Pérou en Guadeloupe. Après filtration, la CLD a été analysée sur les phases dissoute et particulaire et la teneur en MES a été mesurée. Une analyse des données à l’échelle annuelle a été menée afin de déterminer le fonctionnement du bassin versant (BV). Plus spécifiquement à l’échelle de la crue, les mécanismes de contamination ont été abordés par le biais des hystérèses. Les bilans des quantités de matières ont également été calculés pour mettre en évidence la prédominance de l’une des deux phases. A l’échelle annuelle, l’analyse révèle une teneur en MES augmentant avec le débit de prélèvement des échantillons (0,0003 – 4 g/L) et traduisant une charge plus importante du ruissellement comparativement à l’écoulement de base. Concernant CLD dissoute, la concentration varie de 4 μg/L à 0,01 μg/L pour de faibles débits (< 15 m³/s) confirmant la contribution importante de l’écoulement de base via l’exfiltration des nappes fortement contaminées à la concentration en rivière. Pour des débits plus élevés, la concentration augmente légèrement (< 0,01 – 1 μg/L) indiquant que le ruissellement participe à l’augmentation de la concentration en CLD dissoute qui contrebalance l’effet de dilution. Les concentrations en CLD particulaire varient 10 μg/kg – 1500 μg/kg. A l’échelle de la crue, la dynamique générale de transport (boucle horaire) désigne un épuisement de la MES au cours de l’événement. Les quantités exportées ne peuvent être fournies avec exactitude en raison des limites de la courbe de tarage. Néanmoins, ils montrent pour la CLD une équivalence des phases dissoute et particulaire en crues dans la moitié des situations étudiées. En montée de crue, la phase particulaire prédomine dans la moitié des cas, soulignant l’importance du transport solide lors de cette phase. L’hypothèse du transfert majoritaire de la CLD en phase particulaire en rivière est donc vérifiée uniquement en montée de crue dans la présente étude. Plus largement, la méthodologie mise en oeuvre dans ce travail pourrait être appliquée dans d’autres contextes volcaniques tropicaux contaminés.