Évaluation rétrospective de la relation entre l'indice de masse corporelle et la phénotype inflammatoire de l'asthme

Abstract

Objectifs : L’asthme et l’obésité sont de nos jours deux maladies qui touchent une majorité de la population et sont en perpétuel évolution. L’obésité est par ailleurs une comorbidité indéniable de l’asthme bronchique. C’est pourquoi il est essentiel d’explorer le lien qui existe entre ces deux pathologies afin de faire face aux enjeux de santé publique. Tout d’abord nous avons étudié la répartition des phénotypes inflammatoires de l’asthme en fonction de l’indice de masse corporelle sur un échantillon de population liégeoise. Ensuite l’influence d’autres facteurs sur le phénotype inflammatoire a été étudiée pour chaque catégorie d’indice de masse corporelle. Matériel et méthodes : une base de données du CHU de Liège comprenant des sujets asthmatiques de tout âge confondu à partir de 6 ans a été analysée. Pour y être inclus, le sujet doit avoir consulté un pneumologue du CHU de Liège, répondu à des questionnaires et passé une série d’examens notamment une analyse de sputum. Les individus ont été catégorisés en 4 groupes distincts : les dénutris (<18,5), les personnes ayant un poids dans les limites de la norme (18,5 – 24,9), les personnes en surpoids (25 – 29,9) et les obèses (>30). Résultats : Dans notre large cohorte de 1816 patients, nous avons démontré que les phénotypes inflammatoires varient en fonction de la catégorie de poids du patient. De façon intéressante, la catégorie de sujets dénutris présente une forte proportion de phénotypes inflammatoires neutrophiliques (35%) et éosinophiliques (42%). Ces asthmatiques à l’IMC<18.5 ont plus souvent une maladie à début précoce et associée à une sensibilisation aux aéro-allergènes communs. Par ailleurs, seuls 22% des sujets obèses présentent une inflammation corticosensible alors qu’il s’agit de la catégorie pondérale qui présente le moins bon contrôle symptomatique de l’asthme. Les prédicteurs des phénotypes inflammatoires semblent similaires dans les différentes catégories pondérales, et tels que rapportés précédemment dans la littérature. Conclusion : L’inflammation bronchique de l’asthmatique varie en fonction de son IMC. Phénotyper l’asthme du sujet obèse semble d’autant plus important que seuls 22% d’entre-eux ont une inflammation bronchique éosinophilique. En effet, l’absence d’inflammation corticosensible chez 78% des asthmatiques obèses permet d’éviter l’escalade thérapeutique dans la prescription des corticostéroïdes, recommandée en cas de mauvais contrôle symptomatique par les guidelines GINA, qui serait inutile chez les non éosinophiliques et responsable d‘effets secondaires. La dissociation entre inflammation bronchique et contrôle symptomatique chez l’asthmatique obèse est le plus probablement explicable par un problème de mécanique ventilatoire avec restriction des volumes pulmonaires. La prise en charge de ces patients doit indispensablement comporter l’obtention d’une perte pondérale et le maintien d’une activité physique régulière.