Quels sont, à la fois, les enjeux managériaux et les risques juridiques d¿intégrer des collaborateurs externes en Ressources Humaines dans l¿entreprise via une politique de Total Workforce Management ?

Abstract

Le marché du travail belge est aujourd'hui impacté par l’arrivée de nouvelles formes d’emploi atypiques telles que les I-Pros, les freelances, les solo entrepreneurs ou les gig workers. Selon nos sources documentaires, les I-Pros constituent une catégorie englobante de travailleurs hautement qualifiés reprenant dans les domaines créatifs les freelances et dans les domaines techniques les solo entrepreneurs. Les gig workers sont quant à eux plutôt considérés comme des travailleurs moins qualifiés exerçant au moyen de plateformes numériques. L’arrivée de ces collaborateurs externes remet en question le système binaire belge divisé entre le salariat et l’indépendance. En effet, pour de nombreux aspects, les I-Pros, freelances, solo entrepreneurs et gig workers, bien que déclarés à la sécurité sociale et aux SPF Finances comme exerçant sous le statut d’indépendant, flirtent avec les apparences d’un contrat de travail. L’apparition d’une zone grise entre les deux pôles salarié et indépendant a d’ailleurs été soulevée par de nombreux chercheurs. De plus, la discordance au niveau du nombre de possibilités de statuts intermédiaires du point de vue des sciences de gestion et du point de vue du droit nous a permis de nous questionner sur la possibilité pour le législateur belge d’introduire un nouveau statut juridique intermédiaire au cœur de cette zone grise. Les entreprises, quant à elles, sont confrontées à la nécessité de se positionner face au Total Workforce Management, c'est-à-dire face à l’inclusion des travailleurs externes dans des stratégies formelles de gestion des ressources humaines. En effet, les organisations sont confrontées tous les jours à de nouveaux défis pour intégrer et engager ces prestataires externes dans leurs missions au sein de l’entreprise. Les interviews réalisées auprès des trois acteurs de la relation de travail, les collaborateurs externes en ressources humaines, les entreprises utilisatrices et les intermédiaires de marché ont révélé que globalement, les entreprises se basent encore sur une approche relationnelle informelle dans leur relation de travail avec les externes ou préfèrent déléguer la gestion de ceux-ci à des intermédiaires de marché. À travers les interviews, nous avons également pu constater que les entreprises restaient très craintives par rapport au risque de requalification du contrat commercial en contrat de travail. En effet, celles-ci témoignent mettre un point d’honneur à considérer les travailleurs externes comme des membres à part entière de l’équipe mais continuent de prendre des précautions dans leurs actions ponctuelles favorisant l’engagement et l’intégration afin de ne pas développer une apparence de contrat de travail.