Comprendre les interactions de classe avec les élèves à haut potentiel : l'éclairage apporté par le concept de connaissance ouvragée des enseignants.

Abstract

Cette recherche interroge les processus d’enseignement à l’égard des élèves à haut-potentiel. En Fédération Wallonie-Bruxelles, le haut potentiel intellectuel (HP) figure parmi les besoins spécifiques d’apprentissages qui requièrent des aménagements raisonnables. La littérature de recherche a mis en évidence les actions particulières que les enseignants peuvent mettre en place pour soutenir les apprentissages de ce public particulier d’élèves (Freeman, 2004; Cuche et al, 2010; Baudry et al., 2021). Parmi les recommandations, certaines relèvent des opportunités d’apprentissage offertes, alors que d’autres concernent plus spécifiquement le soutien émotionnel apporté par l’enseignant. Cette recherche s’intéresse plus particulièrement à la manière dont leurs connaissances sur les besoins particuliers de ces élèves se sont construites, à la lumière du paradigme de la « connaissance ouvragée des enseignants » (Vause , 2010 & 2011). Par le biais d’entretiens, Vause en a investigué les sources ainsi que les modes de construction et d’évolution. Toutefois, Vause n’a pas ciblé ses recherches sur une thématique particulière, mais s’est intéressée aux connaissances des enseignants d’une manière générale. Notre recherche a donc approfondi la réflexion en explorant les connaissances pour enseigner à un public particulier d’élèves, les élèves à haut potentiel.

Sur le plan méthodologique, nous avons mené une étude qualitative visant à comprendre comment les connaissances des enseignants pour soutenir ce public particulier d’élèves se sont élaborées. Pour cela, au cours de sept entretiens semi-directifs (Van Campenhoudt & al., 2017 ; Beaud & Weber, 2010 ; Olivier de Sardan, J.-P., 2008) avec des enseignants du secondaire, nous avons approfondi, les thématiques suivantes : - Ce qu’ils savent du profil HP ; - S’ils adoptent démarche particulière à l’égard de(s) (l’) élève(s) HP ? - Le cas échéant, comment ils ont acquis les ressources qu’ils mettent en œuvre plus particulièrement à l’égard de(s) (l’) élève(s) HP ?

Nous questionnerons donc les origines de ces connaissances : o l’histoire personnelle des enseignants, o leurs formations, o leurs expériences de terrain.

Une analyse par théorisation ancrée (Lejeune, 2019 ; Glaser et Strauss, 2017 ; Paillé, 1994) de chacun des entretiens a permis à notre matériau d’évoluer, afin d’approfondir notre réflexion et de circonscrire le phénomène. Il se dégage de nos résultats que c’est l’empathie qui permet à ces enseignants d’adopter trois types de réponses. Une première démarche, de type cognitif, est de s’informer des caractéristiques de ces élèves. Ensuite, une démarche de type affectif permet de déployer de l’attention et de leur assurer, notamment, un climat de sécurité. Enfin, une démarche comportementale sera de mettre en œuvre une dispositif différencié. L’appréhension par les enseignants des aménagements raisonnables sera aussi discutée.

Enfin, il apparait que c’est le fait de se référer à un vécu, qu’il soit personnel, scolaire ou professionnel, qui permet à ces enseignants de forger des attitudes qui répondent à l’écho que ces élèves provoquent en eux. Nous nous sommes dès lors demandée si la référence à un vécu pouvait être constitutif d'une compétence professionnelle. Les conditions et les limites de cette compétence sont étudiées. De plus, la notion d’identité professionnelle et celle des attitudes socio-professionnelles qui les sous-tendent est discutée.

Pour finir, nous avons esquissé deux enjeux en termes de formation initiale et continuée des enseignants.