Impact des variations climatiques sur la survie et le recrutement des populations de sonneurs à ventre jaune (Bombina variegata)

Abstract

L’ampleur des changements climatiques actuels affecte les taux démographiques de nombreuses espèces. Les amphibiens, de par leur cycle de vie complexe, leur métabolisme ectothermique et la perméabilité à l’eau de leur peau, constituent le groupe de vertébrés le plus menacé par les variations du climat. Cependant, les relations qui relient les taux démographiques aux variations des températures et des précipitations s’avèrent complexes et changeantes entre les espèces mais également entre les populations d’une même espèce. Dans ce contexte, nous avons étudié l’impact des variations des maxima de températures et des cumuls de précipitations durant la période estivale sur les taux de survie et de recrutement parmi vingt-six populations (France, Belgique, Allemagne, Suisse et Italie) de sonneurs à ventre jaune (Bombina variegata), un amphibien protégé et menacé de disparition se reproduisant dans des points d’eau éphémères. Les données de marquage-capture-recapture ont été analysées par des modèles de Cormack-Jolly-Seber afin de caractériser la survie et le recrutement dans chaque population, en y injectant les variables climatiques continues (relation linéaire) ou en leur indiquant les années correspondant à des extrêmes de chaleur ou de sécheresse (variable discrète). Ensuite, des méta-analyses et des modèles linéaires généralisés ont permis de tester des patrons généraux et des paramètres explicatifs potentiels. Il est ressorti de nos analyses une forte variabilité, parmi les différentes populations, dans la magnitude et dans le sens de la relation liant les variations climatiques et les extrêmes climatiques aux taux de survie et de recrutement. L’ampleur de l’impact des variations des températures et des précipitations est apparue comme plus importante pour les taux de recrutement que pour les taux de survie. Nos résultats suggèrent une influence de l’anthropisation de l’habitat qui demande à être étudiée davantage. Les fortes variations inter-populationnelles dans la réponse aux extrêmes climatiques témoignent de la diversité intraspécifique des réponses des espèces face à ce changement. Elles invitent à approfondir l’étude des caractéristiques des sites qui résistent au changement mais pour cela, il convient de poursuivre les suivis afin de pouvoir tester plus finement les extrêmes sur de longues périodes temporelles, c’est-à-dire en incluant davantage d’années « extrêmes ». Il est en effet envisageable de penser que l’accentuation future des extrêmes climatiques prenne le pas sur les variations locales les tempérant actuellement et induise ainsi des réponses généralisées.