Apprentissage explicite de la Langue française Parlée Complétée à des enfants sourds âgés de cinq à huit ans : étude de cas multiples

Abstract

La lecture labiale (LL) présente de nombreuses limites qui ne permettent qu’une perception limitée de la parole. Pour les personnes sourdes, ces limites peuvent être palliées par la Langue française Parlée Complétée (LPC, appelée Cued Speech dans sa version anglaise initiale), code manuel qui permet, en désambiguïsant la LL, de fournir une information phonologique claire et complète sur le langage oral. Les études montrent de grands bénéfices sur la perception du langage oral lorsque la LPC est utilisée avec la LL (Alegria et al., 1999 ; Charlier et al., 1990 ; Périer et al., 1987) et soulignent une amélioration plus marquée lorsque la LPC est utilisée précocement et à la maison que tardivement et à l’école. Cependant, des bénéfices peuvent encore être tirés même si l’exposition ne débute qu’autour de six ans (Alegria & Lechat, 2005). Par ailleurs, certains travaux montrent l’impact d’un apprentissage explicite (et non implicite, par imprégnation) de la LPC sur la perception du langage oral (Rees et al., 2017 ; Miesse, 2011).

Dès lors, l’objectif de ce mémoire est de déterminer si un apprentissage explicite de la LPC permet à des enfants sourds âgés de cinq à huit ans d’en décoder les clés en six mois de temps et d’ainsi désambiguïser la LL. Nous avons proposé à quatre enfants un apprentissage explicite de la LPC dans le cadre de leurs séances logopédiques individuelles habituelles, à raison de trois fois par semaine. Pour évaluer leurs capacités de décodage de la LPC, nous avons construit une tâche de désignation d’images représentant des sons proches, que nous leur avons proposée avant (T0), pendant (T1 et T2) et après l’entraînement (T3). La tâche était présentée en deux temps : d’abord avec la LL uniquement, et ensuite avec la LL accompagnée de LPC. Nos résultats ne montrent d’amélioration significative dans le décodage de la LPC que chez un enfant sur les quatre, pour la moitié des mots, ce qui ne nous permet pas de conclure à une amélioration des performances au cours du temps. En outre, au terme de l’apprentissage, les performances en modalité « LPC » n’étaient pas significativement meilleures que celle obtenues en modalité « LL », excepté pour un enfant. Il serait intéressant de reproduire cette étude de manière quantitative, avec davantage d’enfants, sur une plus longue période de temps, et avec d’autres outils d’évaluation.