Suivi de l'interaction du raton laveur avec les arbres à cavités et la faune qui leur est associée sur le massif forestier de Saint-Michel Freyr

Abstract

Le raton laveur (Procyon lotor) est une espèce exotique envahissante présente en Belgique depuis les années 1980. Son aire de répartition ainsi que sa population ont depuis crû de manière exponentielle, faisant craindre de sa part un impact notable sur la biodiversité. En 2022, une étude réalisée en Wallonie a évalué l’impact du procyonidé sur les oiseaux forestiers nichant en cavité artificielle. Bien que cet impact soit jugé faible, cette étude a révélé un attrait marqué pour les nichoirs, soulevant des craintes de potentielle compétition si les populations de raton laveur venaient à croître davantage. L’objectif de ce travail est de vérifier si cet attrait était tout aussi prononcé pour les cavités des pics et les autres cavités naturelles, en posant les hypothèses que certaines caractéristiques de la cavité en elle-même ou de l’arbre qui la porte pourraient constituer un facteur attractif (hyp1) et que la richesse spécifique observée sur un arbre à cavité pourrait également être corrélé à un accroissement de son potentiel attractif pour le raton laveur (hyp2). Pour ce faire, quarante-deux pièges photographiques ont été déployés dans la forêt domaniale de Saint-Michel Freyr, chacun d’eux monitorant la base d’un arbre à cavités pendant une durée de trente jours, avant d’être déplacé sur un autre arbre à cavités. Au total, 175 déploiements ont été réalisés entre le 23 janvier et le 24 juillet. Pour chacun des arbres suivis, une série de variables environnementales a été collectée afin d’évaluer leur potentiel attractif pour le raton laveur. En tout, 161 séquences impliquant un raton laveur ont été enregistrées, dont plus de 20 % montrent un individu grimpant au tronc de l’arbre, suggérant ainsi un comportement loin d’être anodin. La discrimination des variables clés favorisant le processus de grimpe (hyp1) s’est révélée complexe, bien qu’une tendance semble se dessiner en faveur des arbres présentant un état de décomposition avancé et/ou des cavités de taille moyenne (5-9 cm de diamètre) ou grande (suffisante pour abriter un raton laveur). Par ailleurs, le fait que la majorité de ces comportements se produise en mai et juin, période correspondant à la nidification, suggère un impact potentiellement important sur les espèces cavernicoles. D’autant plus que nos résultats ne montrent pas de compétition directe entre le raton laveur et les autres espèces de mammifères prédateurs indigènes (hyp2). La pression de prédation exercée pourrait ainsi s’ajouter à celle d’autres prédateurs, comme la martre des pins, plutôt que la remplacer. Favoriser le maintien d’arbres à cavités en densité importante pourrait en partie diminuer cet impact, en en maximisant le nombre de loges potentielles pour les oiseaux. Dans le cas de nidification d’espèces sensibles, il semble également judicieux de protéger individuellement les arbres avec des dispositifs anti-prédation ainsi que de maintenir localement les efforts de piégeage pour limiter la croissance des populations.