Mémoire des événements quotidiens et lésions cérébrales : Exploration des processus de segmentation, compression et binding

Abstract

La mémoire épisodique joue un rôle central dans la construction de l’identité et la continuité du soi, en permettant de revivre des événements personnels avec leurs détails contextuels. Parmi les mécanismes cognitifs sous-jacents, la segmentation des événements, la compression temporelle et le binding apparaissent comme déterminants pour la qualité des souvenirs. L’étude des altérations de ces processus chez des patients avec un traumatisme crânien (TC) est donc essentielle pour mieux comprendre l’impact des lésions sur la mémoire des événements de la vie quotidienne. L’objectif de ce mémoire est d’examiner les différences entre un groupe clinique (patients ayant subi une lésion cérébrale, n = 10) et un groupe contrôle apparié (n = 19) sur la mémoire d’événements quotidiens et sur les processus cognitifs de segmentation, compression et binding. L’étude a utilisé une méthodologie innovante reposant sur l’Experience Sampling Method (ESM) avec la tâche « Liège – Recall of Events via Continuous Assessment of Personal Experiences » (L-RECAP), qui permet une évaluation écologique de souvenirs rapportés en contexte réel. Parallèlement, des tâches de rappel de vidéo et de parcours standardisé ont permis de mesurer précisément les processus ciblés. Les participants ont également complété un bilan neuropsychologique et plusieurs questionnaires auto-rapportés (mémoire, bien-être, détresse psychologique, qualité de vie). Les résultats n’ont révélé aucune différence significative entre les groupes, que ce soit sur les performances mnésiques quotidiennes (exactitude, richesse interne, spécificité, phénoménologie) ou sur les mesures de segmentation, compression et binding. En revanche, les analyses corrélationnelles ont mis en évidence plusieurs associations significatives : une intensité émotionnelle et une durée plus longue des événements étaient liées à une meilleure exactitude, spécificité et richesse des souvenirs, tandis qu’une détresse psychologique accrue était associée à des souvenirs moins précis et moins spécifiques. En conclusion, bien que les hypothèses de différences intergroupes n’aient pas été confirmées, l’étude souligne l’intérêt de méthodes écologiques comme le L-RECAP pour appréhender la mémoire en contexte réel. L’absence de significativité statistique, probablement liée à la taille réduite de l’échantillon, invite à la prudence mais ouvre des perspectives méthodologiques et cliniques prometteuses pour l’évaluation fine des altérations mnésiques et de leurs déterminants.